Ski de randonnée dans les Selkirk : Une aventure unique en pleine nature avec Florina Beglinger

Ski de randonnée dans les Selkirk : Une aventure unique en pleine nature avec Florina Beglinger

J’ai commencé à guider des randonnées à quatorze ans, travaillant au refuge de ski hors-piste de mes parents pendant mes étés au secondaire, puis à l’université. Enfant des montagnes, j’ai rapidement compris que ma vie la plus épanouissante se passerait dehors, à montrer aux gens la beauté simple de la nature. Les voir s’émerveiller devant les prés fleuris, les lacs et les glaciers me remplissait de joie. Cet amour des humains avec qui je partageais la montagne m’a poussée vers le monde plus complexe et risqué du guidage de ski et d’alpinisme. Ce n’est pas toujours facile, je l’ai vite appris.

Guider en ski, c’est naviguer en permanence entre le risque et la récompense. Il faut évaluer cette ligne floue qu’est la sécurité, choisir des descentes à la fois excitantes et adaptées aux conditions du jour – parfois même de l’heure. Cette ligne bouge sans cesse. En montagne l’hiver, la notion de « sécuritaire » n’existe pas vraiment; il y a toujours une part de risque inhérente.

Mes semaines de guidage en ski hors-piste commencent par un vol en hélicoptère vers le Durrand Glacier Chalet, un refuge isolé dans les Selkirk, près de Revelstoke, en Colombie-Britannique. Nous y allons en groupe : seize invités, deux autres guides et l’équipe du refuge. Depuis quelques années, je suis devenue guide en chef. Sur mes épaules repose la sécurité de tous. C’est un rôle gratifiant, mais un poids immense à porter.

Les skieurs arrivent en tant qu’étrangers, ne connaissant souvent que quelques personnes du groupe. Moi, j’arrive avec un plan pour la semaine, la tête remplie de stratégies pour gérer les risques, anticiper l’état du manteau neigeux et maximiser leur expérience. Les premiers jours sont une période d’adaptation. On laisse derrière nous la couverture cellulaire et nos préoccupations du quotidien pour plonger dans la nature, entourés de visages inconnus. C’est à la fois excitant et déstabilisant.

C’est exactement ce qui se passait il y a quelques semaines, à la fin janvier, lors d’un voyage inoubliable. Ce jour-là, toutes les conditions étaient réunies, et j’ai pu skier des descentes que je n’avais encore jamais guidées, malgré mes centaines de journées passées dans ce secteur. Quand le risque d’avalanche est faible et que la météo est idéale, on peut repousser nos limites et explorer les coins les plus reculés du territoire. C’est ce que les clients recherchent, année après année : l’occasion d’atteindre ces sommets inaccessibles en temps normal.

Le matin du troisième jour, nous avons quitté le Durrand Glacier Chalet pour nous rendre dans la zone reculée du Moloch. Contrairement à notre refuge principal, qui offre des chambres privées et beaucoup d’espace, le Moloch Chalet est plus petit, plus rustique. Ici, tout le monde partage une chambre. Il n’y a pas d’internet. J’adore ça. C’est en l’absence de connexion numérique que naissent les vraies connexions humaines.

Nous avons gravi le Mont Fang et dévalé ses 850 mètres verticaux sur la descente exaltante de Kaleidoscope, avant de remonter un col menant à l’amphithéâtre de granit et de glaciers qui entoure le refuge du Moloch Chalet. À ce moment-là, notre groupe de huit était prêt à passer quelques nuits loin du confort habituel. Chacun portait une partie des provisions, que j’allais cuisiner. Les repas du chef devraient attendre; notre objectif était désormais d’atteindre le Mont Graham, notre sommet le plus élevé, perché à près de 3 000 mètres d’altitude.

Alors que le soleil se couchait dans cette vallée encaissée, entourée de pics imposants, la magie a opéré. Autour de la table, les rires fusaient, les histoires s’échangeaient, les blagues circulaient. Nous étions arrivés. J’étais arrivée. Je retrouvais ce lien que j’avais recherché en tant que jeune guide de randonnée au secondaire. Peu à peu, les barrières sociales s’effaçaient, les étrangers devenaient des amis. De mon côté, je relâchais enfin cette tension constante liée aux risques et aux décisions à prendre, retrouvant la simplicité du moment présent. Dehors, sous un ciel étoilé, nous étions seuls. C’était magique.

Le lendemain matin, nous sommes partis, unis, vers le Mont Graham. Les conditions étaient plus difficiles que prévu. Je doutais que nous atteignions le sommet, mais j’étais certaine que cette journée serait marquante quoi qu’il arrive. J’aurais pu rebrousser chemin et choisir un autre objectif, mais une lueur d’espoir me poussait à avancer.

Alors que nous progressions en kick-turn sur les pentes abruptes, je réalisais que la neige s’améliorait. Nous allions y arriver ! Un des skieurs avait peur du vide, alors je l’ai aidé… mais pas seulement moi. Tous les autres skieurs l’ont soutenu. Nous étions devenus une équipe. À coup d’encouragements, nous l’avons convaincu qu’il ne nous ralentissait pas, qu’on voulait tous atteindre le sommet ensemble.

C’est ça, la beauté du guidage. Chacun vient chercher son propre défi en montagne, mais au fil du temps, l’esprit d’équipe prend le dessus. La réussite du groupe devient plus importante que la performance individuelle. On accepte de ralentir son rythme pour avancer ensemble. C’est magnifique.

Du sommet du Mont Graham, nous avons contemplé le monde s’étendant sous nos pieds. Nous voyions nos traces en zigzag dans la pente, l’endroit où nous avions laissé nos skis, et le petit Moloch Chalet, minuscule en contrebas. On se réjouissait déjà d’une autre soirée de rires et de cartes, réchauffés par un sentiment d’accomplissement et de camaraderie.

Les défis de la montagne nous rapprochent. C’est ce que j’ai toujours aimé dans mon métier, et c’est pourquoi je resterai à jamais une enfant des montagnes. Ne grandissons jamais au point d’oublier cette magie.